« Paul Verhaeghe, le chasseur de Watts de la SNCF »
Chaque année, la facture énergétique de la SNCF s’élève à plus d’un milliard d’euros. C’est le premier poste de dépenses externes à l’entreprise. Economiser l’énergie, c’est donc une préoccupation quotidienne, d’autant plus que les questions environnementales sont de plus en plus prégnantes dans la société. Si nous, citoyens, pouvons tous éteindre la lumière en sortant de chez nous, il s’avère un peu plus compliqué d’optimiser les dépenses en énergie d’un train. Faire rouler des trains plus écologiques, c’est le métier de Paul Verhaeghe.
Crédit photo SNCF
La chasse au gaspi est lancée à la SNCF. Surtout quand on sait que la raison d’être de l’entreprise est d’« apporter à chacun la liberté de se déplacer facilement en préservant la planète ». L’un des acteurs clés de cette dynamique est Paul Verhaeghe, expert énergie au cluster sud d’Oullins. Cet ingénieur en génie électrique aurait aussi bien pu travailler dans le nucléaire ou l’automobile mais son alternance au bureau d’étude du Matériel de Rouen-Quatre Mares le convainc de rejoindre la grande famille du ferroviaire.
Le premier levier sur lequel joue Paul, c’est la maîtrise de la consommation d’énergie des trains. Un sujet qui passionne ce spécialiste de la chaîne de traction des locomotives, autrement dit du système qui permet d’alimenter tous les organes nécessitant de l’énergie électrique. Il a ainsi contribué à développer deux outils à intégrer dans les trains : une balise de géolocalisation et un compteur d’énergie. Ce dernier permet de calculer en temps réel la consommation des trains et ainsi établir une facturation plus précise. En effet, cela permet de départager la consommation de chaque entité alors qu’aujourd’hui les factures sont établies au prorata du nombre de trains que fait rouler l’entité. C’est aussi un moyen d’analyser les pratiques des conducteurs, pour leur permettre d’adopter une conduite plus économique et plus écologique, dans le même esprit que l’éco-conduite pour les automobilistes. Ce compteur permet de donner une vitesse de référence au mécanicien. La tenue de cette vitesse limitera la consommation d’énergie. Pour donner un ordre de grandeur, un TGV consomme sur 1 kilomètre, l’équivalent de ce que peut consommer sur une journée une famille de 5 personnes. En attendant la mise en place effective, les conducteurs essaient de rouler au maximum sur « l’erre », c’est-à-dire avec l’énergie emmagasinée par le train.
Pour réaliser ces compteurs, il a fallu réaliser des prototypes, mener des tests sur le terrain et travailler main dans la main avec les Technicentres. Aujourd’hui le produit est en phase de déploiement et Paul supervise les installations sur des séries de locomotives pouvant compter de 10 à 100 engins.
Faire rouler des trains plus propres est une préoccupation qui a suivi Paul tout au long de son parcours, ainsi, il a réalisé son stage de fin d’étude au CIM (Centre d’Ingénierie du Matériel) de SNCF, où il a pu travailler sur un projet de locomotive hybride. À l’issue de celui-ci, il complète son expérience en passant un trimestre dans le groupe Bombardier en Suède. L’occasion de découvrir une nouvelle culture d’entreprise chez un grand constructeur.
À son retour en France, en 2011, Paul mène des études d’amélioration de la documentation de maintenance pour l’Ingénierie du Matériel. Concrètement, il combine documents constructeurs et retours d’expérience terrain en technicentres afin de proposer des fiches de réparation adaptées. Il intègre SNCF deux ans plus tard, pour travailler au suivi de séries de matériels roulants. À lui d’améliorer et de veiller à la qualité, la sécurité et la disponibilité des engins, pouvant aller d’une dizaine à une centaine d’unités. Son envie de rester pleinement en contact avec le terrain le pousse à effectuer un stage en tant que DPX (Dirigeant de proximité) au technicentre de maintenance Rhône-Alpes puis, en 2017, il est nommé ingénieur chef de lots études. Une solution intermédiaire, qui lui permet d’être quotidiennement en lien avec des interlocuteurs très variés, allant du chef de projet Matériel, aux ingénieurs « Vie Série » (en charge du suivi d’un parc de locomotive), en passant par les fournisseurs ou encore les agents en technicentres.
Son poste est en contact direct avec les activités telles que FRET par exemple, et c’est une vraie satisfaction pour lui de réussir à établir une communication et un rapport de confiance avec elles. En effet, il constate que SNCF a encore parfois des difficultés pour entendre la voix de ses clients alors que cela devient de plus en plus primordial avec l’ouverture à la concurrence. Les délais de réalisation des études sont parfois difficiles à respecter. Une meilleure réactivité est souvent la première demande de nos clients, avec la maitrise des coûts bien entendu. Des résultats positifs qui convainquent aussi à l’externe puisque la filiale MASTERIS du Matériel a positionné le compteur d’énergie sur un appel d’offre externe. Ce projet confirme l’ouverture du Cluster sud, son entité d’Ingénierie, vers les Tiers.
Le parcours de Paul VERHAEGHE en 5 dates
2010
Diplômé de l’ESIGELEC (École supérieure d’ingénieurs en génie électrique) en alternance au Technicentre Industriel de Rouen Quatre-Mares
2011
Travaux de documentation de maintenance pour l’Ingénierie du Matériel
2013
Embauché à la SNCF en tant qu’ingénieur « Vie série » à Oullins et réalise un stage en tant que DPX (Dirigeant de Proximité) au Technicentre de maintenance Rhône-Alpes
2017
Ingénieur chef de projet au cluster Sud
2025
Pourquoi pas devenir chef de projet ? Ou bien DUO (Dirigeant d’Unité Opérationnelle) en sein d’un atelier de maintenance?
3 questions à Paul VERHAEGHE
Quelle est votre plus grande fierté ?
C’est le fait d’apporter des solutions au client. En étant en première ligne avec les fournisseurs et les clients, une confiance s’instaure. Cette confiance, qui donne une bonne image de l’entreprise à l’extérieur, est ma plus grande récompense.
Comment imaginez-vous le futur avec les robots ?
Les robots prennent de plus en plus de place, ils doivent venir en appui aux salariés mais ne doivent pas les remplacer. Le savoir-faire d’un opérateur ne se remplace pas par un robot. Parmi les enjeux importants pour l’entreprise, il y a l’information voyageur, les robots peuvent peut-être l’améliorer en permettant une meilleure réactivité sur les applications des smartphones ?
Que vous évoque la notion d’usine du futur ?
Faciliter la qualité de vie au travail. Pour moi, cela correspond à une robotique qui vient en aide aux agents. Les robots peuvent mettre à disposition les approvisionnements, cela permettrait un gain de temps et de santé. L’usine du futur sera aussi dématérialisée, pour l’instant par exemple, les ordres de modifications (OM) sont distribués sous forme de Pdf dans les Technicentres de maintenance. Bientôt, ils seront disponibles sur tablette.
UNE CARACTERISTIQUE, UN MOT, UN DICTON