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Sinem KAHRAMAN / SOUDURE

By Juin 2019
NUMÉRO 03 – JUIN 2019

SINEM KAHRAMAN

SOUDURE

TECHNICENTRE INDUSTRIEL DE BISCHHEIM

C’est une histoire d’amour, de passion et d’intégration, comme la SNCF peut en compter ces 80 dernières années. L’histoire d’une jeune femme arrivée en France par hasard et qui désormais fait la fierté du Technicentre de Bischheim, en Alsace. Une histoire de conquête féministe également : Sinem Kahraman est l’une des rares soudeuses à travailler dans un technicentre.

Crédit photo SNCF

Il était une fois une jeune femme turque, âgée de 18 ans, qui part à la conquête du monde. Tout commence en 2001, lorsque Sinem Kahraman, revenue d’un séjour à Londres, rencontre son mari à Strasbourg, à l’occasion de vacances. Le couple s’installe en Alsace et Sinem travaille dans le restaurant et l’épicerie de sa belle-famille. En parallèle, elle suit une formation de caissière et travaille son français.
Un jour, à l’occasion d’une discussion, un ami soudeur l’encourage à découvrir ce métier. « Je n’avais jamais vu quelqu’un souder, je n’avais aucune idée de ce qu’était ce métier » se souvient Sinem. Avec le soutien de son mari, elle entame une formation de six mois, qu’elle valide avec succès et obtient trois qualifications. Elle reste encore aujourd’hui la seule femme de son centre de formation à avoir validé autant de certificats professionnels. Mais le chemin de l’emploi est néanmoins semé d’embûches pour les personnes issues de l’immigration, encore plus lorsque l’on est une femme dans un « métier d’hommes ». Après une dizaine de refus, elle toque à la porte du Technicentre industriel de Bischheim, qui lui ouvre non sans mal : lorsqu’elle arrive pour son entretien, le recruteur tourne les talons en découvrant que c’est une femme. Heureusement, il revient très vite et embauche Sinem.

Pour elle, c’est une plongée dans un autre monde : l’usine, les cadences, le ferroviaire. Dans un technicentre comme Bischheim, on démonte entièrement les trains après 15 à 20 ans de service pour tout vérifier et changer les pièces si besoin. Mais ce monde lui plaît et elle gravit rapidement les échelons. Au bout de 5 ans à souder l’acier, elle passe à l’aluminium des TGV Duplex. Sous ses doigts, les défauts disparaissent.

« Je n’aime pas lâcher, quand j’ai quelque chose en tête je veux le faire et pas à moitié » 

Une mentalité indispensable pour s’imposer comme seule femme dans un milieu d’homme où elle doit souvent faire deux fois plus pour prouver ses compétences. Si certaines voix se sont parfois élevées pour suggérer qu’elle n’y arriverait pas, la détermination de Sinem les a vite fait taire.
Mais homme ou femme, le corps a ses limites et le travail physique de Sinem a abîmé son dos et ses cervicales : impossible pour elle désormais de continuer à souder. Le sujet est sensible et les larmes difficiles à contenir quand elle évoque avec sincérité combien « l’idée [qu’elle ne soudera plus] est dur à avaler ».
Elle a donc achevé au printemps 2018 une formation de quatre mois, à la pratique du contrôle END par ressuage, validée par un examen qu’elle a réussi du premier coup. C’est à elle qu’incombe à présent la tâche de s’assurer de la qualité du travail et de la parfaite sécurité des pièces. Mais aussi de l’accompagnement d’une nouvelle génération de soudeurs… et de soudeuses !

1 END : l’END ou contrôle non destructif est un ensemble de méthodes qui permettent de caractériser l’état d’intégrité de structures ou de matériaux, sans les dégrader, soit au cours de la production, soit en cours d’utilisation, soit dans le cadre de maintenances.
2 Ressuage : le ressuage est une méthode permettant de détecter les défauts des soudures à l’aide d’un liquide coloré ou fluorescent.

Le parcours de Sinem Kahraman en 4 dates

1996

Baccalauréat en Turquie et poursuit à l’université des études d’économie

2001

Travaille dans la restauration à son arrivée en France

2007

Soudeuse au Technicentre industriel de Bischheim (diplômée de 3 qualifications en soudure)

2019

Opératrice END ressuage Niveau 1

2025

Experte en END

3 questions à Sinem Kahraman

UNE CARACTERISTIQUE, UN MOT, UN DICTON

« Une volonté de feu, c’est ce qui m’anime. »

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Arnaud GURHEM / EXPERT ESSIEUX

By Mai 2019
NUMÉRO 02 – MAI 2019

ARNAUD GURHEM

EXPERT ESSIEUX

CAMPRA

La crise essieux survenue en 2010 a été résolue collectivement, grâce à l’engagement des équipes des TM de Paris- Nord et de Villeneuve. Le portrait présenté ici ne minimise en rien cette mobilisation.

« Roue qui tourne ne rouille pas » dit un proverbe grec. Ce pourrait être le mantra d’Arnaud Gurhem. Avec son catogan plaqué en arrière et ses tatouages, le technicien détonne. A force de travail et d’acharnement, l’ancien mécanicien est devenu expert essieu au sein de la direction du Matériel. Son défi quotidien ? Adapter les règles de maintenance et l’organisation du travail à l’innovation, pour ne pas rater le train du progrès et faire en sorte que la roue tourne en faveur de SNCF.

Crédit photo SNCF

20 petites secondes.
C’est le temps qu’il faut aujourd’hui pour contrôler les centaines de roues d’un TGV et les essieux qui les relient. Une prouesse technique, en passe d’être industrialisée, et sur laquelle Arnaud travaille depuis 2015. En partant de bancs de maintenance utilisés aux Etats-Unis pour le fret, il a réalisé des bancs adaptés à la grande vitesse, avec un système de détection par laser et caméras. Ainsi, le TGV circule à 30 km/h sur le banc et tous les essieux sont auscultés en 20 secondes. Auparavant, il fallait arrêter le train plusieurs heures pour prendre les mesures manuellement.

« Il y a une technologie qui fait qu’il faut toujours aller plus vite, on s’adapte pour garder notre travail », explique Arnaud.

Ses gains de productivité sont, pour lui, la condition sine qua non du maintien de la performance de SNCF et plus largement de l’avenir des cheminots.

Cette conviction, il la tient des « crises » qu’il a eu à gérer depuis son arrivée à SNCF en 1997. La roue du progrès a parfois quelques bosses et accrocs en avançant…

En 2010, il doit faire face à une très grave crise essieux sur la ligne D. A l’époque, on craint même de devoir mettre à l’arrêt les 155 trains de la ligne. Arnaud, alors rapporteur mécanique à Paris Est, est appelé par le directeur Transilien et résout l’incident. Idem plus récemment, en juillet 2017, lorsqu’un problème impacte des Transilien à la gare St Lazare. Dans l’atelier de maintenance, les trains entrent en flux continu avec les mêmes défauts aux roues, alors que la plupart étaient en bon état deux mois auparavant. En cause : une modification de parcours qui a entraîné plus de freinages et d’accélérations qu’à l’ordinaire. Pour répondre à l’urgence, Arnaud conçoit en une semaine un nouveau plan de maintenance.

« L’innovation est allée plus vite que l’organisation, il faut donc changer le système de management assez vite pour suivre les évolutions » estime-t-il.

Or, la roue de l’innovation ne s’arrête jamais de tourner.
L’équipe projet à laquelle il appartient travaille déjà sur un banc de maintenance permettant de contrôler l’intégralité d’un train (caisses, pantographes, organes de frein, etc). En 2015, il a également remporté le Prix de l’Innovation, grâce à son application « Dojo » – clin d’oeil à sa passion pour les arts martiaux – qui répertorie les différents défauts des essieux et facilite le travail de maintenance.

Le parcours d’Arnaud Gurhem en 5 dates

1997

Agent au tour en fosse de Paris Nord

2000

Diplômé d’un DUT en génie industriel / maintenance

2005

Rapporteur mécanique à Paris-Est

2011

Expert essieux à la direction du Matériel

2025

Diffuser les nouvelles technologies dans tous les établissements Matériel

3 questions à Arnaud Gurhem

UNE CARACTERISTIQUE, UN MOT, UN DICTON

« Je suis rentré à la SNCF complétement par hasard, puis j’y ai trouvé des gens qui sont devenus des amis. »

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Jérémy LEPELTIER / EXPERT MÉCANIQUE

By Avril 2019
NUMÉRO 01 – AVRIL 2019

JEREMY LEPELTIER

EXPERT MÉCANIQUE

TECHNICAMPUS

Passionné de mécanique et de technique, Jérémy Lepeltier a travaillé pendant près de 10 ans dans une grande écurie automobile avant de rejoindre en 2014 les paddocks de la SNCF. Après avoir été formateur en mécanique au Technicampus, il y travaille aujourd’hui en tant qu’ingénieur pédagogique.

Crédit photo Adrien Dasté

Il en a eu assez des tours de circuits et des arrêts au stand de 30 secondes chrono. L’envie aussi de se confronter à des matériels autrement plus lourds et complexes qu’une voiture, tout en gardant la vitesse et l’endurance en ligne de mire… L’amélioration de la performance mécanique : voilà ce qui anime Jérémy. Car en Formule 1, comme pour les TGV, ce sont souvent les petits détails qui font les grandes victoires. Jérémy est à l’origine de l’une d’entre elles.

En 2014, lors des sessions de formation qu’il anime, des stagiaires lui font remonter que de nombreuses pièces comportant un taraudage1 sont mises au rebut alors qu’elles seraient réparables. Un problème que Jérémy a déjà rencontré dans l’automobile, où l’on utilise un « filet rapporté », une pièce cylindrique, en acier inoxydable et pouvant s’insérer dans des pièces en aluminium ou en acier afin d’y accueillir la vis. Cela permet en plus de consolider la pièce dans laquelle elle est installée. Mais cette solution est-elle applicable aux trains, des engins de taille et de poids bien supérieur ?

S’engage alors un travail de longue haleine : il recense les quelques établissements qui utilisent déjà cette solution, mais sans en maitriser encore toute la technique, contacte ensuite des fabricants et calcule le gain financier pour l’entreprise. Pour l’accompagner dans ce recensement ainsi que dans la création des documents de maintenance,  un groupe de travail est monté avec d’autres experts du Matériel. Il aboutit ainsi à un « filet rapporté » adapté au ferroviaire. Reste encore à l’industrialiser et le diffuser largement dans l’entreprise, pas toujours évident. Heureusement, « ma présence au Technicampus m’a permis d’avoir un rayonnement national » explique-t-il, ce qui a rendu possible la généralisation de cette solution. Désormais, un document de maintenance est rédigé pour l’ingénierie, des process d’applications sont disponibles et 300 agents ont été formés à cette solution.

« Innover c’est avant tout créer du lien », constate Jérémy en bon formateur.

Pour lui, innover c’est moins inventer une technique que partager les solutions, créer du lien entre l’interne et l’externe, entre les collaborateurs. Pour cela, il faut valoriser les essais, les tests, au risque parfois d’échouer.
Mais cela peut être payant : en seulement trois ans, Jérémy est passé d’une simple idée à une innovation déployée largement et permettant un gain d’un million d’euros2 pour SNCF. Avec en prime un bénéfice écologique : les pièces vivent plus longtemps et sont désormais, lorsque c’est possible, réparées et non plus jetées. Cela règle aussi les problèmes d’approvisionnements de pièces, réguliers avec des trains qui vivent une quarantaine d’années. Bref, un « coup du chapeau », un « hat-trick » comme on dit en Formule 1, qui permet à la SNCF de conforter sa pole position.

1 Taraudage : Le taraudage correspond à la partie de la pièce dans laquelle s’insère une vis.
2 Montant estimé suite à l’application de cette nouvelle méthode de maintenance, aux moteurs tractions de vingt-deux séries d’engins moteurs TGV en 2018.

Le parcours de Jérémy Lepeltier en 4 dates

2004

Technicien puis équivalent DPX durant 10 ans au sein d’une écurie automobile

2014

Formateur en mécanique au Technicampus

2019

Ingénieur pédagogique et de formations en mécanique et soudure

2025

Responsable d’un Lab Innovation à la SNCF ?

3 questions à Jérémy Lepeltier

UNE CARACTERISTIQUE, UN MOT, UN DICTON

« Quand un homme a faim, mieux vaut lui apprendre à pêcher que de lui donner un poisson. »
Confucius

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